
Qu’est-ce que l’accompagnement “spirituel” ? En quoi peut-il aider à s’orienter dans sa vie ? Doit-il obligatoirement être fait par un prêtre ou une religieuse ? Voici ce que nous allons tâcher d’aborder ici aujourd’hui.
Je précise tout de suite ici que je parle depuis ma foi, qui est celle de l’Eglise catholique romaine, mais vous pouvez transcrire selon vos croyances propres ! Je pense que des transcriptions et parallèles sont possibles.
Personnellement, j’ai commencé à être accompagnée “spirituellement” quand j’étais étudiante. Je travaillais dans une école et la jeune soeur novice qui y était a deviné que je pouvais me sentir appelée à la vie religieuse. Je lui ai dit que je pensais entrer au Bec-Hellouin. Elle m’a demandé si j’étais accompagnée. Je lui ai dit que non. Elle m’a demandé si je voulais l’être, je lui ai dit que oui. Elle m’a demandé si je pensais à quelqu’un. Je lui ai dit, oui, mais que je n’osais pas lui demander. En fait, c’était sa maîtresse des novices, une femme d’expérience dont j’appréciais la ludicité, l’humour et la bienveillance. Je la voyais une fois par mois et elle m’a aidé à me préparer à répondre à cet appel à la vie monastique. Je lui parlais de quoi ? de ma vie d’étudiante, de mes engagements chrétiens, du divorce en cours de mes parents, de mes désirs et de mes questions, de la découverte du fait que j’avais une petite soeur… bref, de ma vie !
Alors qu’entend-t-on par “accompagnement spirituel” dans le cadre de l’Eglise catholique – je pense que je pourrais dire même plus largement “chrétienne” ? Si j’emploie des “gros mots”, je dirais qu’il s’agit de discerner ce qu’est la volonté de Dieu sur notre vie. Dans la perspective chrétienne, chaque personne est unique et a une vocation, un appel et donc une mission dans le monde. Il s’agit d’écouter l’Esprit-Saint (d’où l’adjectif “spirituel”) pour voir ce que Dieu veut pour nous. Cela peut paraître assez “extérieur” comme définition. Mais dans la perspective chrétienne, Dieu nous a créés et nous connaît comme “de l’intérieur”. Ecouter l’Esprit-Saint, c’est donc apprendre à devenir pleinement nous-mêmes. Ecouter Dieu, c’est apprendre de Lui – comme dit saint Paul : “ce qui est bon, ce qui lui plaît, ce qui est parfait” (Romains, 12,2) car alors nous nous accomplirons véritablement, nous serons la personne que nous sommes “destinés” à être.
Comment ça marche ? Cela passe par un dialogue avec une personne en qui nous avons confiance. La régularité moyenne est d’une fois par mois, mais nous pouvons aussi bien voir cette personne moins souvent ou plus souvent selon les périodes de notre vie et nos besoins. Je partage à cette personne ce que je vis, mes questions, mes doutes, mes joies, mes défis. Et la personne qui m’accompagne me pose des questions auxquelles je suis libre de répondre ou pas. Son but est de m’aider à y voir plus clair. On voit là que même si l’accompagnement est dit “spirituel”, il concerne toute ma vie en tant que personne : mes relations avec les autres, avec Dieu, avec moi-même; mes questionnements, mes combats, mes réalisations. C’est un lieu où je peux tout aborder. Avoir un regard extérieur me permet de prendre de la distance vis-à-vis de ce que je vis. Si je garde la personne qui m’accompagne un certain temps, elle me connaît et m’aide à l’accueillir telle que je suis, à avoir un regard à la fois réaliste et bienveillant sur ma personne. C’est donc un soutien.
Avoir un lien de confiance est vraiment fondamental dans ce type de relations, de même que la liberté de choix de la personne qui accompagne. Car vous devinez bien que les abus peuvent être aisés et des manipulations sont possibles au nom même de la foi. Des abus spirituels ont existé dans de nombreuses communautés. Au Québec, le curé ne donnait pas la communion aux parents qui n’avaient pas d’enfants dans l’année (jusque dans les années 70), manière parfaitement abusive de faire pression sur la vie intime des couples… Sans parler des abus sexuels commis dans le cadre de la confession ou des accompagnements spirituels, où était “spiritualisés” l’acte sexuel… Des victimes de tels abus ne peuvent plus jamais vouloir être accompagnées “spirituellement” de nouveau et c’est grave. Le discernement de départ est donc vraiment important.
Par qui être accompagné ? quand je suis sortie du monastère, tout le monde me disait qu’il “fallait” que je prenne un jésuite, réputé spécialiste du discernement. Derrière cela, il y a aussi le préjugé que cela doit “forcément” être un prêtre qui accompagne. Alors, j’ai personnellement surtout été accompagnée par des femmes depuis mes vingt ans et surtout des religieuses. Mais je ne crois pas qu’il soit du tout obligatoire que cela soit un prêtre ni une religieuse. Ce qui compte, c’est la personne soit formée et à l’écoute de l’Esprit-Saint. Pas qu’elle dise elle-même l’être mais que TU perçoives qu’elle l’est. En vie spirituelle, comme dans la vie “naturelle”, c’est l’enfant qui fait le père ou la mère et non l’inverse. En vie naturelle, tu deviens parent, papa ou maman parce que tu as un enfant. En vie spirituelle, c’est la personne accompagnée qui décide qui l’accompagne et qui reconnaît alors que la personne qu’elle a choisie pour l’accompagner peut l’aider. Le fait d’être prêtre ou religieux ne rend pas automatique la capacité de la personne à en accompagner d’autres. Et une personne laïc peut très bien accompagner.
Pour finir, je voudrais aborder la question de la “nécessité” d’un tel accompagnement. Est-il toujours nécessaire d’être accompagné spirituellement ? Nous n’avons pas les mêmes besoins tout au long de notre vie. Je pense que nous trouvons différents moyens de vivre ce discernement spirituel pour chercher et voir ce qui est juste pour nous à l’instant. L’accompagnement spirituel est un des moyens possibles de ce discernement, il est loin d’être le seul. Prier, méditer et lire la Bible, tenir un journal, échanger avec d’autres chrétiens ou avec des proches sur ce que nous vivons, voici autant d’autres moyens efficaces de discernement. Je le conseillerais en tant de “crise” personnelle. Car ce regard extérieur réaliste et bienveillant nous aide à élargir notre regard, à nous poser les bonnes questions, à nous sortir de ce qui peut nous enfermer. Je ne crois pas qu’il soit obligatoire sous cette forme spécifique. Ce qui compte c’est d’avoir des espaces de dialogues, de réflexions pour prendre de la distance et ne pas rester sur son quant à soi.
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