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Face à une révélation d’abus sexuels, la réaction du premier interlocuteur compte énormément. Que l’on soit coach, enseignant, éducateur, parent ou accompagnant, il existe des repères essentiels pour accueillir la parole sans l’abîmer, protéger sans brusquer et orienter sans réactiver le traumatisme. Cet article propose des lignes directrices simples et sûres pour agir avec justesse auprès des mineurs comme des majeurs qui révèlent avoir vécu des abus sexuels.
Lorsqu’une personne révèle ou laisse entendre qu’elle a subi une violence sexuelle, l’accompagnant se trouve dans une position délicate. Ce n’est ni un rôle thérapeutique ni un rôle d’enquêteur, mais il existe des repères pour agir avec justesse et sécurité, tout en respectant la réalité psychique de la personne. Les recommandations ci-dessous concernent les mineurs et les majeurs, en distinguant ce qui relève du devoir de protection et de ce qui relève d’un accompagnement juste.
Accueillir la parole avec justesse
Lorsqu’une personne confie un fait d’abus, il est essentiel de créer un espace sûr et respectueux.
Il s’agit de :
• écouter sans interrompre ;
• éviter tout doute ou minimisation ;
• remercier la personne pour sa confiance ;
• rappeler qu’elle n’est pas responsable des violences subies,
- conserver une posture calme, stable, sécurisante..
Ce que cela représente pour la personne de parler
Révéler un abus sexuel n’est jamais anodin. Cela peut représenter :
• une énorme prise de risque émotionnelle ;
• le bris d’un secret porté depuis des années ;
• la peur de ne pas être crue ;
• la honte, alors qu’elle n’est pas responsable ;
• la crainte de bouleverser son entourage ;
• un mélange d’effondrement et de soulagement.
La révélation est souvent un acte courageux, douloureux, et profondément vulnérable. Parler peut être une étape de reconstruction, mais cela implique toujours un coût psychique. L’accompagnant doit recevoir cette parole avec grande délicatesse et sans la pousser plus loin que ce que la personne souhaite dire.
L’impact de faire raconter : comprendre la réactivation traumatique
Demander à la personne de “raconter en détail”, de préciser, de décrire les faits, peut provoquer une réactivation du traumatisme.
Les mécanismes de psychotrauma font que :
• le cerveau revit les faits comme s’ils se produisaient dans le présent ;
• l’état de sidération peut réapparaître ;
• des images, sensations corporelles ou émotions très fortes peuvent remonter ;
• la personne peut se sentir dépassée, confuse ou dissociée.
C’est pourquoi il est essentiel de ne jamais chercher à obtenir un récit complet.
L’accompagnant n’a pas à tout savoir : quelques mots suffisent pour accueillir et orienter.
Les détails relèvent d’un cadre thérapeutique ou judiciaire, où des professionnels formés savent gérer la reviviscence traumatique.
Ce qu’il ne faut jamais faire
Certaines attitudes peuvent aggraver la situation ou mettre la personne en danger. Il est important de ne pas :
• poser des questions intrusives ou orientées ;
• mener une enquête ou chercher à savoir “tous les détails” ;
• promettre la confidentialité sans discernement, surtout face à un mineur ;
• minimiser les faits ;
• encourager la personne à affronter directement son agresseur ;
• prescrire les décisions à prendre ;
• porter un jugement moral ;
• se substituer aux professionnels compétents.
Il est bon aussi d’éviter de toucher la personne physiquement – même si cela part d’une « bonne intention » de montrer son soutien – car c’est un des sens qui a été touché par l’agression sexuelle et qui est sensible. Il est bon de dire son soutien oralement, en croyant la personne et par son engagement et sa présence lors de la révélation mais en évitant le contact physique.
Le danger d’encourager une rencontre avec l’agresseur
Certains environnements suggèrent encore : « Tu devrais lui parler », « Va le confronter », « Tu ne seras jamais en paix si tu ne le vois pas ».
C’est une recommandation dangereuse.
Pour une victime, rencontrer l’agresseur représente :
• un risque majeur de réactivation traumatique ;
• une exposition à l’emprise ou à la manipulation ;
• un rapport de force inégal ;
• un impact psychique potentiellement dévastateur.
Seuls des professionnels spécialement formés (psychotraumatologues, médecins, intervenants judiciaires) peuvent évaluer si une confrontation est envisageable, et cela reste extrêmement rare. L’accompagnant doit rappeler que la priorité est la sécurité et la protection, jamais la confrontation. Même au tribunal, la confrontation a lieu de façon particulière, en France, elle se passe en présence d’un juge, le mis en cause se trouve devant avec son avocat et arrive avant la victime qui est elle aussi accompagné de son avocat. C’est le juge qui pose les questions et les échanges se font aussi par avocat interposé.
Accompagner un majeur victime de violences sexuelles
Pour les majeurs, la personne reste libre de ses démarches. L’accompagnant peut :
• informer sur les recours possibles (plainte, associations, soins spécialisés) ;
• encourager une consultation médicale ou psychologique ;
• proposer un appui pour identifier les ressources locales ;
• rappeler qu’elle a des droits et du temps.
Il ne doit PAS :
• imposer une plainte ;
• décider à sa place ;
• transmettre des informations à un tiers sans son accord, sauf danger grave.
Accompagner un mineur victime de violences sexuelles
Lorsqu’un mineur révèle des faits, la loi impose un devoir de protection. L’accompagnant doit :
• écouter sans poser de questions intrusives;
• s’assurer de l’absence de danger immédiat ;
• effectuer un signalement au 119 ou au procureur de la République ;
• si vous travailler dans une structure : informer la direction ou le responsable légal de la structure selon les procédures prévues par elle ;
• il n’y a PAS d’obligation légale de prévenir les parents et si les agressions ont lieu au sein de la famille, il peut-être préférable de ne pas le faire
Ne jamais promettre de garder le secret. Le devoir de protection prime.
OBLIGATION DE PREVENIR en CAS DE VICTIME MINEUR ou de PERSONNE VULNERABLE – L’article 434-3 du Code pénal prévoit que “quiconque ayant connaissance” de mauvais traitements, de privations ou d’atteintes sexuelles sur un mineur de moins de 15 ans — ou sur une personne vulnérable — doit informer sans délai les autorités judiciaires ou administratives compétentes. QUE FAIRE POUR PREVENIR ? – téléphoner au 119 « enfance en danger » pour signaler le fait – écrire au Procureur de la République DES DOCUMENTS DE REFERENCE SUR LA QUESTION : https://www.justice.gouv.fr/sites/default/files/2023-05/Guide_justice_des_mineurs.pdf https://www.cours-appel.justice.fr/sites/default/files/2019-04/Guide-relatif-%C3%A0-la-prise-en-charge-des-mineurs-victimes-DACG-2015.pdf https://association-cvm.org/public/media/uploaded/pdf/guide-protection-enfance-tarn.pdf https://secretpro.fr/secret-professionnel/fiches-legislation-commentee/code-penal/article-226-14 |
Documenter sans enquêter
Il est utile de noter :
• les mots exacts de la personne ;
• la date, l’heure, le contexte ;
• les éléments factuels, sans interprétation.
| SECRET PROFESSIONNEL ET OBLIGATION DE DENONCIATION Article 226‑14 du Code pénal Le secret professionnel est la règle générale (défini par l’article 226-13), mais l’article 226-14 prévoit des exceptions : lorsque des violences — physiques, psychiques ou sexuelles — sont constatées ou soupçonnées sur un mineur (ou une personne vulnérable), le professionnel peut lever le secret et signaler aux autorités. Ainsi, un médecin, un psychologue, un travailleur social, un éducateur etc., ne s’expose pas à des poursuites pénales, civiles ou disciplinaires si, de bonne foi, ils informent les services compétents. Article 434‑1 du Code pénal (et associés comme l’Article 434‑3 du Code pénal) — Non-dénonciation / non-assistance à personne en danger Cet article sanctionne le fait, pour quiconque ayant connaissance d’un crime ou délit — ou d’un danger pour une personne — de ne pas le signaler. En pratique : si un accompagnant a connaissance d’un abus sexuel sur un mineur ou d’une situation mettant une personne en danger, le silence peut constituer un délit de non-assistance à personne en danger. Cadre de la protection de l’enfance et “information préoccupante” La loi relative à la protection de l’enfance (2007) organise la notion d’“information préoccupante / signalement” : toute personne — citoyen·ne, professionnel·le, bénévole — qui suspecte qu’un mineur soit en danger doit pouvoir signaler. Ce dispositif officialise le devoir de vigilance et de protection avant le secret, quand l’intérêt de l’enfant est en jeu. |
Orienter vers les ressources adaptées
L’accompagnant ne travaille jamais seul. Il oriente vers :
• des psychologues spécialisés en psychotrauma ;
• un médecin ;
• des associations ;
• les services sociaux et judiciaires.
Savoir reconnaître ses limites
L’accompagnant n’est ni thérapeute ni enquêteur. Son rôle consiste à accueillir, protéger, orienter et transmettre si nécessaire.
Conclusion
Face à une révélation d’abus sexuels, la manière dont la première parole est accueillie peut profondément marquer la suite du parcours. La violence sexuelle est déjà une dépossession : il ne s’agit pas d’y ajouter une dépossession supplémentaire en poussant à raconter, en minimisant, en doutant ou en dépassant son rôle. Accueillir avec respect, agir dans le cadre légal et orienter vers les ressources adaptées sont les bases d’un accompagnement juste. Connaître ces repères permet de protéger, mais aussi de créer un espace où la dignité, la sécurité et la parole de la personne restent au centre.
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