
Lors de ma formation de coaching, on m’a parlé pour la première fois de la posture « méta », le fait d’être dans la relation d’accompagnement et en même temps comme « à côté » ou « au-dessus » pour écouter ce qui se passe de façon plus globale, en soin, dans la relation, autour de soi… Qu’est-ce que cette posture et en quoi elle est utile ?
La posture méta : se voir agir pour mieux accompagner
Être en posture d’accompagnement ne consiste pas seulement à écouter ou à poser les bonnes questions. C’est aussi une affaire de posture intérieure : une manière d’être en lien avec soi, avec l’autre, et avec ce qui se joue entre les deux. Dans ce champ de conscience, la posture méta a une place particulière : elle permet de prendre du recul sans se retirer du lien.
Le mot méta vient du grec et signifie “au-delà”.
Il ne s’agit pas de s’extraire de la réalité, mais de la regarder depuis un autre plan, celui où l’on perçoit le mouvement, les interactions, les causes profondes.
La posture méta n’est pas une posture intellectuelle : c’est une attitude de conscience élargie, à la fois ancrée, lucide et profondément humaine.
La posture de fond : l’ancrage intérieur
Avant même d’accompagner, il y a une posture de fond : celle qui s’enracine dans ta vision du monde, ton éthique, tes valeurs, ta conception de l’humain.
C’est le socle sur lequel repose ton métier de coach, de formateur, de manager ou de superviseur.
Cette posture n’est pas visible, mais elle se ressent : dans ta manière de poser le cadre, d’écouter sans jugement, de respecter le rythme de l’autre.
La posture de fond, c’est ce qui te permet de rester stable, même quand la relation bouge.
Elle te relie à ton intention d’accompagner, à ta confiance dans les ressources de la personne, et à la clarté de ton rôle.
Elle parle de ce que tu incarnes, pas seulement de ce que tu fais.
La posture en situation : la présence à l’instant
Vient ensuite la posture en situation, celle du moment présent : ta façon d’être en lien, de te positionner dans la conversation, de respirer avec ce qui se vit.
Elle implique la disponibilité, la qualité de présence, et cette écoute fine qui capte autant le verbal que le non-verbal.
C’est ici que s’exprime ton ajustement : tu peux te taire, reformuler, relancer, contenir ou questionner.
Chaque geste, chaque mot vient traduire ta posture dans la relation.
Mais elle reste fluide : tu t’adaptes au contexte, à la personne, à ce que le processus d’accompagnement exige.
La posture méta : se voir agir sans se juger
La posture méta, enfin, est celle du regard au-dessus du regard.
C’est la capacité à observer ce qui se passe — en toi, chez l’autre, et dans l’espace entre vous — tout en restant pleinement présent.
Elle ne consiste pas à analyser froidement, mais à développer une conscience réflexive :
« Que suis-je en train de faire ? »
« Que se joue-t-il entre nous ? »
« Quelle émotion m’habite, et que me dit-elle ? »
Cette posture demande de la maturité : elle implique de savoir reconnaître ses propres mouvements internes sans s’y laisser absorber.
Elle s’affine avec la pratique réflexive, le travail sur soi et la supervision.
C’est elle qui permet de ne pas confondre son propre scénario avec celui de la personne accompagnée.
Dans cette position méta, tu n’es plus seulement dans l’action ou la présence : tu es aussi dans la conscience du processus.
Tu accompagnes, mais tu observes aussi comment tu accompagnes.
Ce double mouvement — engagement et observation — est au cœur de la compétence professionnelle et de la justesse relationnelle.
La posture méta et la supervision
Dans les métiers de la relation, la supervision est un espace privilégié pour cultiver cette posture méta. Elle permet de revisiter les situations vécues, d’en comprendre les résonances, de repérer les transferts, et de retrouver un sens plus large à l’action. La supervision n’est pas un contrôle, mais un espace d’apprentissage réflexif : elle aide à relier ce que l’on vit, ce que l’on ressent et ce que l’on comprend.
En supervision, on peut oser ce pas de côté, ce “voir autrement” qui redonne souffle et liberté intérieure. C’est là que se développe la capacité à se regarder agir sans jugement — à repérer ses automatismes, à les comprendre, à les transformer. Elle permet au professionnel de renforcer son discernement et sa qualité de présence, deux piliers de l’éthique de l’accompagnement.

Lors de ma formation en supervision, le formateur a utilisé l’image de la piscine. En tant que superviseur.e, on est à la fois « dans la piscine » avec son client et à la fois en mode « surveillant de baignade » qui regarde bien ce qui se passe dans le bassin ! En supervision, cette posture est comme décuplée et des outils comme les sept regards sont précieux pour développer cette vision à 360° !
La posture méta au-delà du coaching
La posture méta ne concerne pas uniquement les métiers de l’accompagnement.
Elle est précieuse dans de nombreux contextes, car elle aide à réintroduire de la conscience dans l’action.
🧩 En management, elle permet de sortir du pilotage automatique : observer une réunion, une décision ou un conflit en prenant un léger recul aide à mieux comprendre les dynamiques d’équipe.
Un manager en posture méta peut ajuster sa communication, éviter les réactions impulsives et poser un cadre plus juste.
💬 En communication, elle favorise l’écoute et la régulation émotionnelle.
Être capable de se dire intérieurement : “Ce que je ressens maintenant influence ma manière d’écouter” change radicalement la qualité du dialogue.
🌱Dans la vie personnelle, elle aide à repérer les schémas récurrents : tensions, malentendus, cercles relationnels qui se répètent.
Prendre une posture méta, c’est se donner la chance de ne plus “subir” ce qui arrive, mais d’y répondre avec plus de liberté et de conscience.
Une posture vivante et évolutive
Les trois postures — de fond, en situation et méta — ne s’opposent pas, elles se nourrissent.
La posture de fond te relie à ton identité, la posture en situation t’ancre dans la présence, et la posture méta t’ouvre à la conscience.
Elles forment ensemble une dynamique vivante qui te permet de rester juste, souple et lucide.
Car accompagner, travailler, vivre, ce n’est pas seulement faire.
C’est aussi apprendre, chaque jour, à se voir agir pour mieux ajuster sa présence au monde.
📚 Bibliographie –
• Edgar MORIN, La méthode. 1. La nature de la nature, Seuil, 1977.
→ Ouvrage fondateur de la pensée complexe, dont la posture méta incarne une dimension essentielle : relier plutôt que séparer.
• Vincent LENHARDT, Les responsables porteurs de sens : culture et pratique du coaching et du team-building, Éditions Eyrolles, 2015
→ Développe la notion de posture de surplomb bienveillant, proche de la posture méta en accompagnement.
• Peter HAWKINS & Nick SMITH, Coaching, Mentoring and Organizational Consultancy: Supervision and Development, McGraw-Hill, 2006.
→ Référence sur la supervision et la posture réflexive dans les pratiques d’accompagnement.
• Paul WATZLAWICK, Une logique de la communication, Seuil, 1972.
→ Un classique qui met en lumière la nécessité d’un regard méta sur les échanges pour éviter les impasses relationnelles.
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