
Lors de ma formation à l’IFHIM, une des clés d’accompagnement qui m’a particulièrement marqué est le « défi des âges » ! C’est l’idée que chaque âge de la vie est marquée par des étapes, des défis et des besoins différents. En avoir conscience est précieux pour soi-même ou pour en accompagner d’autres !
Les âges de la vie : un chemin, plusieurs repères
Nous grandissons tous. Mais grandir ne signifie pas seulement ajouter des années : c’est aussi traverser des phases, affronter des défis, enrichir son identité. Depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours, les penseurs ont cherché à donner sens à cette progression – et à l’accompagner. En revisitant ces perspectives, l’apport de Jeannine Guindon offre un éclairage précieux pour qui accompagne ou vit son propre parcours.
Origines classiques et repères historiques
L’idée de diviser la vie en « âges » n’est pas nouvelle. Dans l’Antiquité, la pensée grecque puis latine parlaient de trois ou quatre âges : enfance, jeunesse, maturité, vieillesse. Au Moyen Âge, cette segmentation s’enrichit de symbolique — les saisons, les éléments, les métamorphoses humaines. Le corps, l’esprit, la sagesse se succèdent. Puis, au XXᵉ siècle, avec les travaux en psychologie du développement (Erik Erikson, Jean Piaget…), on entre dans une vision plus fine : le développement n’est plus uniquement chronologique, mais structurel et psychique.
L’apport de Jeannine Guindon
Jeannine Guindon (1919-2002), psychologue québécoise et fondatrice de la psychoéducation, a proposé une approche originale des « âges de la vie ». Pour elle, vivre, c’est « actualiser les forces vitales de l’individu » et traverser des étapes dans lesquelles des identités se construisent : corporelle, d’exécutant, individuelle, psychosociale. Elle parle de sept phases, de la naissance à la mort, chacune comportant des défis propres. Elle articule aussi ses travaux avec ceux d’Erikson et Piaget, ajoutant une dimension d’intervention psycho-éducative : c’est moins une chronologie figée qu’un guide pour accompagner.
Les principales phases selon Jeannine Guindon
Voici une synthèse des grandes étapes, en adéquation avec son modèle (le nom exact et le numéro peuvent varier selon les sources) :
- Naissance – petite enfance : émergence de la corporalité, développement sensoriel.
- Enfance – scolaire : apprentissages, repères, identification.
- Adolescence / jeune adulte : construction identitaire, autonomie, choix de vie.
- Vingtaine / adulte jeune : affirmation, projets, engagement dans la vie professionnelle ou familiale.
- Adulte mûr : responsabilité sociale, transmission, réflexion sur le sens.
- Troisième âge / maturité avancée : bilan, ajustement, orientation vers autre chose que l’action.
- Dernières années / vieillesse : retrait, sagesse, confrontation à la fin mais aussi ressources vitales.
Jeannine Guindon insiste sur l’idée que chaque phase est un palier d’actualisation : l’individu est invité à développer ses potentialités, à relever des défis spécifiques, à renforcer ses forces vitales. Elle met l’accent sur l’autonomie psychique — la capacité à être acteur de sa vie — tout au long de ces âges.
Pourquoi ce modèle reste pertinent pour l’accompagnement ?
- Il n’impose pas un âge « normal » mais souligne les défis essentiels à chaque étape.
- Il offre un cadre de repères pour coachs, formateurs, accompagnants : « Quel âge de vie traverse-t-on ? Quels défis ? Quelles ressources mobiliser ? ».
- Il permet de relier développement personnel et dynamique sociale : Guindon ne simplifie pas en « enfant – adulte – vieux » mais nuance.
- Il propose une vision intégrée : corps, psyché, social, identitaire.
Intégrer les travaux antérieurs
Guindon se situe dans la continuité de :
- Erik Erikson, avec ses huit stades psychosociaux (confiance vs méfiance, identité vs confusion, etc.).
- Jean Piaget, avec ses stades de développement cognitif
Elle ajoute la dimension intervention psychoéducative, en dirigeant l’attention vers les forces à développer et non uniquement vers les déficits.
En pratique : quelques pistes pour ton accompagnement
- Lors d’un entretien : identifier l’« âge de vie » que traverse ton client : est-il en phase de construction, de maturité, de retrait ?
- Adapter l’intervention : par ex., pour une personne en troisième âge, privilégier le sens, la transmission, l’actualisation plus que la performance.
- Penser ressources et défis : chaque phase comporte ce qui est à relever et ce qui peut être mobilisé.
- Garder une posture d’accompagnement : chaque âge est valide, aucune phase n’est « meilleure » — c’est le chemin qui compte.
En conclusion
Les âges de la vie ne sont pas simplement des chiffres inscrits sur une année civile. Ils sont des repères symboliques, des espaces de croissance et de transformation. Grâce à l’apport de Jeannine Guindon, ce modèle prend une dimension active : vivre, c’est devenir plus conscient, plus autonome, plus acteur de sa vie : « À chaque âge ses forces, à chaque âge sa liberté » !
| Phase de vie (selon Jeannine Guindon) | Âge approximatif | Tâche de développement | Défis principaux | Ressources à mobiliser | Posture d’accompagnement |
| 1. L’enfance et la découverte du corps | 0 – 6 ans | Prendre conscience de son corps et de soi-même | Dépendance, recherche de sécurité, premières séparations | Bienveillance, stabilité affective, stimulation sensorielle | Offrir un cadre sécurisant et chaleureux, encourager l’autonomie émergente |
| 2. L’enfance scolaire | 6 – 12 ans | Apprendre, s’ouvrir au monde social, intégrer des règles | Comparaison, peur de l’échec, besoin de reconnaissance | Encouragement, valorisation des réussites, sentiment d’appartenance | Soutenir la confiance en soi et le plaisir d’apprendre |
| 3. L’adolescence et l’identité personnelle | 12 – 20 ans | Se différencier, affirmer son identité, choisir | Doute, recherche d’appartenance, crises de valeurs | Exploration, modèles positifs, espaces d’expression | Accueillir les remises en question, accompagner la construction du sens |
| 4. Le jeune adulte et l’engagement | 20 – 35 ans | S’affirmer dans la société, s’engager (travail, couple, projets) | Pression de réussite, peur de l’échec, solitude | Créativité, solidarité, autonomie | Encourager la cohérence entre valeurs et actions |
| 5. L’adulte mûr et la responsabilité | 35 – 55 ans | Consolider ses choix, transmettre, assumer ses responsabilités | Usure, déséquilibre entre sphères de vie, perte de sens | Expérience, discernement, lien social | Aider à réajuster le sens et à maintenir l’équilibre |
| 6. La maturité avancée et la transition | 55 – 70 ans | Réorienter son rôle, accepter les transformations du corps et du statut | Crainte du vide, sentiment d’inutilité | Temps, écoute, liberté intérieure | Favoriser la reconnaissance et la transmission |
| 7. Le grand âge et la sagesse | 70 ans et + | Trouver la paix intérieure, relire sa vie, transmettre | Solitude, perte, dépendance | Mémoire, spiritualité, lien symbolique | Offrir présence, écoute, reconnaissance du chemin parcouru |
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