Se séparer de son conjoint quand on est catho…

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La doctrine catholique sur le mariage a un impact sur le choix d’un certain nombre de femmes de « rester » avec leur conjoint. Je partage ici quelques éléments de réflexion sur la question…

Combien de femmes catholiques ai-je croisé qui ont mis un temps certain avant de pouvoir décider de se séparer d’un conjoint au « mieux » avec qui elles n’étaient pas heureuses, au pire qui était maltraitant et abusif… Pourquoi ? le frein numéro un : les enfants. Il s’agit de les « préserver », de leur donner un modèle de foyer « uni », ne pas les abîmer par un divorce. La motivation est « noble ». La réalité pas si évidente. Je suis fille de parents divorcés. En tant qu’enfant, je ne voulais pas que mes parents se séparent, encore moins qu’ils divorcent. C’était viscérale. Mes parents se sont tout de même séparés et ont fini par divorcer. Et ? Eh bien, cela a permis vraiment de retrouver un climat relationnel beaucoup plus sain au sein de la famille une fois que les choses étaient claires, une fois le passage de la tempête divorce était passé ! Les relations qui étaient devenues habituellement tendues tant au sein du couple qu’entre les différents membres de la famille ont pu s’apaiser. Alors, j’ai envie de dire : regarde l’impact sur tes enfants de la situation et sur ce que tu vis toi-même. Regarde les faits et non juste ce que tu veux donner « en théorie » en restant.

Je ne prétends pas que cela soit facile ni évident. Un premier moyen d’avancer est de s’écouter. Qu’est-ce que je vis ? Qu’est-ce que je porte ? Qu’est-ce que je veux ? Comment vont mes enfants ? Oui, j’ai pris tel engagement il y a tant d’années mais suis-je heureuse avec cet engagement aujourd’hui ? Qu’est-ce qui m’a poussé à faire ce choix ? Pour pouvoir se poser ces questions et écouter ce que nous vivons, ce que nous voulons, réfléchir, il est nécessaire de se poser, de se « pauser ». Et donc ne pas être « la tête sous l’eau » et noyée dans l’action et l’opérationnel… ce qui est bien souvent le cas des mères de famille… Comment prendre de la distance alors ? Quel temps peux-tu te donner pour faire le point sur ta situation actuelle ? Pour regarder l’impact sur toi et sur tes enfants de ta situation ? Et décider ce que tu veux vraiment… Et il y a aussi une question de timing. Quand c’est le « bon » moment pour toi, tu le sentiras de l’intérieur. Dans l’évangile, on parle de kaïros pour parler de ce temps qui est à saisir quand il passe car c’est LE moment, le BON moment. Quand j’ai pris la décision de prendre un temps de recul vis-à-vis de ma communauté, j’étais profondément en paix, alors qu’avant je ne l’étais pas. J’étais ancrée en moi, alignée. Je pouvais faire face aux contradictions. On m’aurait conseillé de partir six mois auparavant, j’aurais réagi avec incompréhension et rejet… Tu es la seule à savoir que c’est le bon moment, le temps juste pour toi, tes enfants…

Un autre élément important est de pouvoir échanger avec quelqu’un de confiance sur ce que tu vis. Là encore, ce n’est pas toujours évident. Dans le cas de maltraitance, ton conjoint peut t’avoir isolée de tes amies, de ta famille et il peut contrôler tes faits et gestes, tes messages sur ton téléphone et tes mails… Quand il y a rupture avec des proches, cela semble encore plus compliqué de reprendre contact, d’autant plus quand c’est pour dire que cela ne va pas. Le faire permet de faire le tri entre les « vrais » amis et proches et… les autres qui se défilent ! J’ai eu la chance et la grâce d’avoir Véronique Margron comme professeur de théologie morale. Disciple de Xavier Thévenot, elle nous a transmis une clé de discernement importante, à savoir l’articulation entre singulier, particulier et universel. Ça veut dire quoi ? Vis-à-vis d’une question, ne pas répondre qu’à un seul niveau. L’universel, c’est la Loi Universelle (ex : le Décalogue…). La question peut-être alors : « Qu’est-ce que cela donnerait sin tout le monde le faisait ? Ensuite, il y a le particulier, ce sont les règles transmises dans un environnement, une culture, un pays, un milieu donné, une génération… Plusieurs particuliers peuvent ainsi avoir des repères différents. Le singulier, c’est la situation précise dans laquelle tu es. Un juste discernement articule les trois niveaux…

  Parfois, des personnes – qui ne partagent pas forcément nos valeurs chrétiennes – peuvent  être beaucoup dans l’injonction : « Tu dois quitter ton mari, tu n’es pas obligée de t’infliger ça. Vraiment, cette foi qui t’oblige à rester, c’est n’importe quoi »… Ce n’est pas aidant pour la personne croyante et va plutôt la pousser à rester. C’est comme si on lui disait que quitter son mari, c’était rejeter sa foi… Ce qui n’est pas le cas.  Pouvoir parler avec quelqu’un qui partage ses valeurs peut être une aide. Se séparer n’est pas une décision facile. Au-delà de ce que cela peut faire vivre aux enfants, c’est aussi reconnaître que l’on s’est trompé, vis-à-vis de soi, vis-à-vis de ses proches. Cela demande beaucoup d’humilité et d’amour aussi. C’est aussi un témoignage pour les enfants – s’il y en a – que ce n’est pas une « obligation » de « rester » à tout coût (parfois coups…) et garder une « apparence » de famille unie… En servant le Christ qui est la vérité, on ne peut pas être dans ce mode « apparence »… Il nous a aussi dit qu’il était le chemin et lui-même était toujours en chemin, se laissant déplacer par les différentes rencontres qu’il a vécu. Relire ses rencontres avec les femmes dans l’Evangile peut être un bon moyen de cheminer vers des libérations intérieures : Anne la Prophétesse, la Cananéenne, la Samaritaine… Il est beau de vouloir donner un bon témoignage…

Nos familles sont humaines et le vrai témoignage vient de cette humanité assumée… Un père de l’Eglise disait : ce qui n’est pas assumé n’est pas sauvé… Cela peut être une pente de notre Eglise de vouloir entretenir des relations faussement policées : dans les familles mais aussi dans les communautés religieuses et paroissiales. La violence qui se cache derrière cette apparence est d’autant plus sournoise et néfaste… La seule perfection à laquelle le Christ nous appelle est la perfection de l’amour. Reconnaître qu’il manque quelque part est un acte d’amour : amour de soi, amour de l’autre aussi. Pouvoir accueillir le fait d’être en route, sur le chemin et ne pas être « arrivée » à une perfection est parfois un deuil à accueillir. Nous en sortons grandi intérieurement, plus humbles et plus humaines !

Je ne dis pas qu’il faille se séparer de son conjoint à la moindre tension et qu’une séparation soit obligatoire. Il existe aujourd’hui des moyens d’être bien accompagné pour avancer. Mais si la situation est vraiment impossible, il est bon d’avoir des critères de discernement et d’avancer car le Christ nous veut libres, heureuses et vivantes !

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